L'Institut suédois est fermé le 1er mai 2024.
Notice close

« Arrête-toi aujourd’hui, demain il peut être trop tard » de Fredrik Sjöberg présenté par Elena BALZAMO

Fredrik Sjöberg est un auteur inclassable. Biologiste de formation, il débute par des ouvrages de vulgarisation scientifique qui, déjà, attirent l’attention par l’élégance de leur style et leur humour. Progressivement, il élabore un genre bien à lui, des histoires à mi-chemin entre essai, autofiction et enquête romanesque. En suivant le destin de quelque personnage du passé, tout en restant continuellement présent dans la narration, toujours menée à la première personne, Sjöberg établit des passerelles entre le passé et le présent, actualise des problèmes qui peuvent paraître obsolètes, mais qui finalement débouchent sur des questionnements universels.

Auteur : Fredrik Sjöberg
Titre suédois : Ge upp i dag – i morgon kan det vara för sent
Nombre de pages : 184
Années de publication : 2013
Editeur : Albert Bonniers förlag, info@albertbonniers.se
Presenté par : Elena Bazamo, elena.balzamo@gmail.com

Dans son livre paru en 2013, qui porte un titre bien sjöbergien, Arrête-toi aujourd’hui, demain il peut être trop tard, il retrace deux destins, à la fois antinomiques et semblables : celui du peintre suédois Olof Ågren (1874-1962) qui met fin à sa carrière au moment même où il atteint la notoriété, pour cultiver un lopin de terre sur une île de l’archipel, et d’une artiste allemande d’origine juive Lotte Laserstein (1898-1993) que la prise du pouvoir des nazis contraint à s’exiler en Suède. Désormais, la peinture pour elle n’est plus une vocation, mais un simple gagne-pain : des décennies durant elle peindra des toiles alimentaires, avant de mourir oubliée de tous. (Sa redécouverte est relativement récente, mais elle a fini par avoir lieu, comme en témoigne une grande rétrospective de ses œuvres organisée l’an passé dans son pays natal.)

Le livre que leur consacre Fredrik Sjöberg est à la fois l’enquête d’un amateur passionné sur deux artistes qui avaient eu leur heure de gloire dans les années 20 et 30 du XXe siècle et dont nul ne se souvenait plus, et une réflexion sur le mystère de la création artistique, sur les rapports entre le créateur et son œuvre, entre les mérites de la persévérance (continuer à tout prix !) et ceux de la lucidité (le jeu vaut-il vraiment la chandelle ?), le rôle du public et de la critique dans un domaine qui ne semble soumis à aucune loi et où pourtant rien n’est vraiment aléatoire.

Depuis ses débuts, dans les années 80, Fredrik Sjöberg a publié une quinzaine de livres, dont deux seulement ont été traduits en français (Piège à mouches, 2011, et la Troisième île, 2014) – tandis qu’en Allemagne et en Italie, par exemple, il est très abondamment traduit. Il serait temps de permettre au public français de mieux connaître l’un des auteurs suédois contemporains les plus originaux.