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DROITS VENDUS « Petit Traité de taxidermie » de Maja Thrane présenté par Marie-Hélène ARCHAMBEAUD

Maja Thrane (née en 1974 à Stockholm) est journaliste culturelle (notamment pour Svenska Dagbladet), traductrice de l’anglais et du français (de René Char, Jacques Ancet, Linda Lê entre autres).

Anvisning att konservera naturalier (Petit Traité de taxidermie) est son premier roman.

Auteur : Maja Thrane
Titre suédois : Anvisning att konservera naturalier
Nombre de pages : 104
Année de publication : 2019
Éditeur : Lejd
Contact : Lejd, info@lejd.se
Présenté par : Marie-Hélène Archambeaud, mharchambeaud@aol.com

Ce court roman poétique, librement inspiré de la vie du zoologiste August Wilhelm Malm (1821-1882), s’ouvre sur la photo en noir et blanc d’une gueule de baleine naturalisée, saillant d’une brèche dans un mur de briques.

Björn et Vera, un couple de néoruraux, nous font pénétrer les secrets d’une maison perdue au fond de la campagne, qui abrita les recherches de cet « intendant » (du Muséum d’histoire naturelle de Göteborg). Au fil de courts chapitres, Maja Thrane entrelace des passages romancés sur les jeunes occupants à la découverte des cycles de la nature avec des évocations plus ou moins documentées du passé, centrées sur la figure du taxidermiste.

La vie d’aujourd’hui s’invite à la campagne : lectures (du Montauk de Max Frisch) ou visionnages (des documentaires de Werner Herzog), visites d’amis citadins, qui connaissent des problèmes affectifs, ou la maladie. Quant à la vie maritale de l’intendant, elle est l’objet de notations savoureuses en même temps qu’émouvantes.

« Sur la route, ils manquèrent de renverser un chevreuil. Virent son dos velu disparaître dans la forêt telle une pensée qui nous échappe. Un épais silence régnait. Comme dans une forêt primaire de pins au garde à vous, dit Véra. En attente de devenir mâts sur un navire qui ne sera jamais construit, dit Björn. Une forêt à traverser à la course, pour échapper à quoi ? »

Le style est poétique dans ses ellipses, ses répétitions, jusque dans sa présentation typographique. L’auteure s’appuie sur des descriptions détaillées de la nature et des techniques employées par l’intendant, pour mieux nous donner à voir ces fragments d’un passé qu’elle a découvert dans des photographies d’époque. L’effet d’étrangeté, d’éloignement, est renforcé par des archaïsmes langagiers et des emprunts à un vieil almanach des travaux agricoles ; le latin du naturaliste est souvent convoqué. Mais ce monde passé et cet environnement naturel nous sont rendus proches grâce à des évocations sensorielles et grâce aux dialogues des personnages, toujours ciselés, non sans humour.

Ce livre nous fait réfléchir sur ce qui reste de ce qui vit, sur notre condition mortelle et sur notre place au sein de la nature, mais également sur les tours et détours qu’emprunte la science. Il peut attirer des lecteurs intéressés aux questions scientifiques et environnementales, aspirant à un certain exotisme scandinave ou dotés d’une sensibilité poétique.

Anvisning att konservera naturalier a été nominé en 2020 pour le prix Katapult du premier roman.