Ester Eriksson est née en 1987 dans la région de Stockholm mais vit et travaille maintenant à Malmö. C’est là qu’elle a suivi sa formation de dessinatrice de BD. Elle est également cofondatrice du collectif artistique, Sad Kickin Girl Gang.
Det finns ingenstans att fly (Il n’y a pas de fuite possible) est son premier roman graphique. En 2017 est paru un deuxième, Jag, Esters Rester (Ce qu’il reste d’Ester). Aucun des deux romans n’a encore été publié en français.
Auteur : Ester Eriksson
Titre suédois : Det finns ingenstans att fly
Nombre de pages : 168
Année de publication : 2016
Editeur : Kartago förlag
Présenté par Florence Sisask, florence.sisask@umu.se
Le livre raconte l’histoire d’Olivia, une jeune étudiante de 25 ans, qui ne va pas bien depuis longtemps. Elle souffre d’anxiété, a l’impression de perdre pied dans l’existence et s’inquiète de ne pas pouvoir contrôler ses émotions. Bien évidemment, la mort prématurée de sa mère n’a rien arrangé à son état psychique déjà instable. Cette dernière lui manque au point de l’empêcher de vivre. Côté famille, seule une tante paternelle la soutient quelque peu. Le seul point d’ancrage stable de sa vie est sa formation en arts plastiques. Ses jeunes collègues et elle forment une petite communauté soudée autour d’un intérêt professionnel commun. Les enseignants aussi ont à cœur le bien-être de leurs étudiantes. Les relations amoureuses d’Olivia en revanche laisssent plutôt à désirer. Son petit ami, Johan, ne montre pas la moindre compréhension pour les hauts et les bas d’Olivia, la soupçonne tantôt de faire semblant, tantôt de se laisser aller et trouve ses recherches d’aide dans les services psychiatriques par trop déstabilisantes pour leur relation. Mais Olivia l’aime-t elle de toute façon vraiment ou a-t-elle juste besoin que quelqu’un la prenne dans ses bras ? Heureusement, Olivia a Katti, sa copine de toujours. Katti fait tout ce qu’elle peut pour aider son amie à reprendre le dessus et n’hésite pas à l’accompagner aux urgences psychiatriques. Olivia pourtant n’est pas entièrement satisfaite de la prise en charge proposée et un engrenage s’enclenche car, malgré ses appels à l’aide, ses facultés d’analyse et sa formidable expressivité, Olivia ne trouve pas de solution à sa situation.
C’est un sujet difficile mais important qu’aborde Ester Eriksson avec une grande délicatesse dans son premier roman graphique, celui des problèmes psychiques grandissants parmi les jeunes. C’est avant tout un sujet qu’elle connaît bien puisque l’histoire d’Olivia est en grande partie autobiographique. Le récit alterne dialogues qui rendent compte du présent de la narratrice et monologues intérieurs où elle donne libre cours à des associations introspectives et revient sur des événements déterminants de son passé.
Le graphisme essentiellement tricolore est novateur, épuré et efficace : bleu pour les décors et l’arrière-plan, noir pour les personnages et les dialogues et rouge pour les monoloques intérieurs d’Olivia, le vernis de ses ongles et le rouge de ses lèvres toujours bien faits et souvent mis en avant, comme pour dissimuler son mal-être. De temps à autre, une exubérance de branchages, voire de connections nerveuses, verts et violets vient envahir quelques pages entièrement dénuées de texte pour donner corps au désespoir d’Olivia. Le trait de dessin pourtant n’est jamais chaotique ou brouillon mais toujours étonnamment esthétique et contrôlé.