Il y a 50 ans, l’une des premières expositions de l’Institut suédois était consacrée à Louis-Jean Desprez, suivie d’une rétrospective au Louvre 20 ans plus tard. Aujourd’hui, l’Institut suédois lui consacre une nouvelle exposition, soulignant son rôle central dans les échanges artistiques entre la France et la Suède au 18e siècle.
Né à Auxerre, Desprez s’inscrit à l’Académie royale d’architecture en 1765, où il se distingue rapidement. Trois ans plus tard, il entame une formation auprès de l’architecte et scénographe Charles de Wailly, dont l’influence marquera durablement son style. Après plusieurs tentatives, il remporte en 1777 le Grand Prix de Rome, amorçant un voyage décisif en Italie. En 1784, il croise la route de Gustave III de Suède, qui, séduit par son imagination et son expressivité, l’invite à Stockholm pour devenir décorateur du Théâtre royal.
Durant la période qui va suivre, Desprez révolutionne la scénographie théâtrale en Europe par des mises en scène spectaculaires. La collaboration artistique entre Gustave III et Desprez restera dans l’histoire comme l’une des plus fructueuses entre commanditaire et artiste. Le roi aurait d’ailleurs affirmé : « Il n’y a que deux personnes en Suède qui ont de l’imagination, Desprez et moi ».
Cependant, après l’assassinat du monarque en 1792, l’artiste tombe en disgrâce et ne parvient pas à obtenir la protection d’autres souverains. Le 19 mars 1804, Desprez s’éteint, seul et ruiné. Ironie du sort, son domicile de Stockholm se situait à quelques pas du Nationalmuseum, où se trouve aujourd’hui l’essentiel de son œuvre.
Inspiré par les ruines antiques, les paysages fantastiques et l’architecture monumentale, Desprez s’inscrit dans la tradition de Giovanni Battista Piranesi et Hubert Robert. Ses œuvres traduisent une fascination pour la face obscure des Lumières, un monde hanté par la grandeur éphémère des civilisations disparues. Architecte, peintre et décorateur, il navigue entre la France et la Suède, entre ciel et terre, passé et présent, imaginaire et réalité.
Cette exposition redonne toute sa place à un artiste dont l’œuvre, à la croisée des disciplines, illustre les tensions et les aspirations d’un 18e siècle en mutation. En révélant son génie visionnaire, elle offre une nouvelle lecture de son héritage, toujours actuel.
Nationalmuseum, Stockholm, est aujourd’hui gestionnaire de la collection et de l’exposition permanente de l’Institut suédois.
Commissaire : Otto Ruin, historien de l’art, dont le travail s’inscrit dans le cadre du programme « jeunes chercheur.ses » de Nationalmuseum, qui permet à ceux.elles-ci de mener des recherches directement autour des collections du musée.
Comité scientifique : Martin Olin, directeur des collections du Nationalmuseum, Linda Hinners, conservatrice des collections au Nationalmuseum.
Cheffe de projet : Maria Ridelberg-Lemoine, responsable du patrimoine et des collections à l’Institut suédois.
Ce projet a été rendu possible grâce à la généreuse donation de Björn et Inger Savén.
Merci également à la fondation Jacob Wallenberg pour son soutien.