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Douze mois de l’amitié franco-suédoise : Juin

Depuis toujours, les artistes voyagent pour chercher inspiration, nouveaux contacts et amitiés. Les échanges artistiques entre la Suède et la France sont justement le thème de l’Institut Tessin, fondé par Gunnar W Lundberg en 1933. À la création de l’Institut suédois en 1971, il fait don de sa collection d’art à l’État suédois afin qu’elle soit présentée de façon permanente chez nous. Puis, à partir de 1982, c'est le Nationalmuseum qui reprend la responsabilité de la conservation des œuvres. À l’occasion des 50 ans de l’Institut suédois, nos amis du Nationalmuseum nous font cadeau d’un texte par mois tout au long de l'année 2021, présentant à chaque fois une œuvre de l’exposition permanente.
Un tableau ancien montrant une mongolfière

Juin 2021 – La montgolfière « La Gustave »

« Je me porte à merveille et croirais presque avoir regagné ma patrie depuis mon arrivée en France. Ici, tout me semble familier. Je parle et comprends la langue, et je sais quelle conduite adopter sans avoir besoin de m’enquérir d’us et coutumes qui me sont étrangers. » Voici le sentiment spontané qui animait Gustave III à son arrivée en France, puis à Lyon le 4 juin 1784. Le roi de Suède revenait d’un séjour de huit mois en Italie, durant lequel il avait profité des arts et la culture du pays, mais n’en parlait pas la langue. En France en revanche, le comte de Haga se sentit comme chez lui. Gustave III utilisa ce titre pour conserver son anonymat, car il souhaitait que son séjour s’apparente à un déplacement personnel. C’est pourquoi il avait décliné toutes formes d’hommages, mais il eut néanmoins du mal à se retirer de la sphère publique. Après une visite du chantier de déplacement du confluent Rhône-Saône et une étude des manufactures de soie, il devait assister à une nouveauté : l’ascension d’une montgolfière baptisée « La Gustave » en son hommage. Nous étions le 4 juin 1784.

Le Stockholms Post-tidningar, organe officiel du roi, décrivit comment « Monsieur Fleurant ainsi qu’une femme [Élisabeth Tible] vêtue d’un costume masculin s’élevèrent dans les cieux à bord d’une corbeille suspendue à un ballon d’air. Arrivés à une certaine altitude, nos deux navigateurs aériens déployèrent un drapeau blanc orné des armoiries suédoises. Le vol dura quarante minutes. Au cours de la descente, le ballon heurta une muraille sur laquelle la femme se blessa légèrement au pied en descendant de l’embarcation qui, trois minutes plus tard, prenait feu. » Malgré l’incident, tout se termina bien. Les deux « navigateurs aériens » avaient eu le temps de prendre leur envol sous les acclamations ; mademoiselle Tible avait chanté l’ariette « Je triomphe, je suis Reine » de l’opéra La belle Arsène, et son compagnon, le peintre Fleurant, lui avait répondu par un autre air, « Quoi, voyager dans les nuages ! », de l’opéra Zémir et Azor. En seulement quelques minutes, la montgolfière « La Gustave » s’était élevée à 1500 m d’altitude pour ensuite parcourir une distance totale de 8 km. De nombreuses gravures témoignent de cet événement, de même que ce tableau de Pierre-Antoine de Machy.

Après avoir assisté à l’ascension de la montgolfière, le comte de Haga rencontra l’abbé de L’Épée, pionnier de l’enseignement des personnes sourdes. Pendant ce temps, deux courtisans du roi, Evert Taube et Gustaf Mauritz Armfelt, parcoururent les boutiques lyonnaises pour y acheter des vêtements en soie. En effet, la délégation avait subi les quolibets des Italiens en arrivant chez eux vêtus des tenues officielles de la cour suédoise. Ils souhaitaient donc s’habiller à la mode, en vue des soirées de gala qui les attendaient à Versailles et au Petit Trianon. Là-bas, les Suédois assistèrent à une nouvelle ascension de montgolfière, « La Marie-Antoinette », le 23 juin 1784.

Texte : Magnus Olausson/Nationalmuseum

L’oeuvre du mois de juin :
Pierre-Antoine de Machy (1723-1807)
La Montgolfière La Gustave, 1784
Huile sur toile, 56 x 46cm
Nationalmuseum, NMTiP 46